" In the heart of the night/ she smiles like Mardi Gras/Spinning in a Dizzy Haze" - She's a Carnival ( Siouxsie Sioux)
C'est un peu enfoncer une porte ouverte que de dire que la musique faconne ce que tu es et qui tu deviendras, puisqu'elle influence ta facon de t'habiller, d'apprehender tes relations avec les autres et tes preferences,ce que tu n'es pas et aussi comment tu reponds a l'art, aux films et meme aux pubs. Musique et mode ont toujours ete les seins de la culture qui nourissent l'ado, et meme l'adulte non repenti; et sans reflechir on pense directement a Hedi Slimane, qui pieds et poings lies a la team Doherty, a contribue a faconner l'avenement du renouveau rock anglais, tant dans les charts qu'a la sortie des lycees parisiens avec ses coupes slims, ses accessoires de dandy et son allure maladive.
Chaque saison de pret-a-porter voit renaitre une , ou meme plusieurs tendances associees a des courants musicaux. Il y a periodiquement le folk hirsute de Devendra Banhardt chez Dries Van Noten, le GRUNGE de Kurt et Courtney avec Jacobs au debut des 00's et cet hiver chez Alexander Wang, Isabel Marant, et meme Dolce & Gabanna (?! soit un peu tout le monde cette annee en fait),
le punk des Sex Pistols chez Westwood,
le goth de Sisters of Mercy ou c'est tous les jours Halloween chez Balenciaga, Balmain et Givenchy en 2008, Comme des Garcons ou Margiela avant et meme
le Disco Glam de Bowie periode Aladdin Sane avec l'inevitable Versace ou meme Dior.
Dior Homme
Meme si en 2008 on a trop d'influences et que tout va trop vite pour signifier reellement quelque chose - ca fait longtemps que porter un t-shirt Ramones ne veut plus dire qu'on est fan du groupe, ni meme qu'on les connait (oui je suis mauvaise), mais juste qu'on adhere a une vague superficielle et epehemere, entierement marketing et decidee par un quelconque bureau de style - pour quelques personnes il reste toujours ces icones, a qui on voudrait ressembler, en vain. Si la maniere de L'art de s'habiller comme ton guitar hero ne date pas d'hier. Je ne pense pas a ces bonnes femmes echevelees, en mini jupe qui eructaient des platitudes il y a 45 ans comme Ronnie Spector et ses Ronettes. Mais plutot a Irene Castle ou Josephine Baker, qui ont libere la femme dans les annees de la premiere guerre mondiale avec leurs cheveux courts et leur frivolite assumee. Des decennies plus tard, la facon qu'ont ces icones de se fabriquer une identite visuelle forte et sauvage sous laquelle point sourdement cette invitation non deguisee a la transgression de toutes les regles continue de me fasciner : se raser la tete comme Sinead, se pointer au Oscars habillee en cygne geant comme Bjork, ou porter bourree un eye liner 60's ombrageux et outrancier assorti d'une improbable meduse capillaire comme Amy Winehouse reste un fantasme de tous les jours.
Si j'avais eu dans les 20 ans en 1975, on m'aurait surement vue faire la queue pour un concert de Blondie sur la 4eme, pas loin de l'appart moisi que je louerais $110 dans East Village. Et je n'aurais pas seulement voulu voir Debbie Harry mais lui ressembler, etre elle. J'aurais voulu ses cheveux platine, son heavy make-up, et sa maniere de danser comme un zombie sensuel. Dans les jours de deprime, j'aurais cherche les grandes chemises mysterieuses de Patti Smith,son allure de corbeau et son chic masculin. Et j'aurais traine au CBGB histoire de voir la nouvelle veste a clous de Joan Jett. Pour leur ressembler, j'aurais donne dans la teinture Manic Panic, le mascara en cake et ecume tous les thrift stores, de St Marks Place a l'avenue C, parce que Debbie avait dit un jour qu'elle avait trouve ses costumes de scene dans une boutique a clodos sur Bowery. Des fringues pourries j'en aurais trouve plein, des trucs uses avec du charme aussi.
Et pourtant, je n'aurais jamais eu l'allure d'une Lydia Lunch, d'une Siouxsie Sioux ou de Stevie Nicks.
Au siecle dernier, donc, realiser son fantasme etait une tache ardue. Point de marketing de masse, de H&M, d'internet ou l'on peut aujourd'hui commander les dernieres creations d'Erin Wasson en direct de NY, ou les jupons en dentelle kitsch des japonaises 18eme siecle d'Harajuku. Il fallait ecumer, racler les fonds de bacs a fripes, se debrouiller pour trouver les clous qu'on alignait soit meme dans le dos d'une veste en cuir , autour d'un ours radioactif ou des trucs dans le genre, a Nancy ou a Camden. Il fallait aller a Goa avec les autres chevelus pour ramener les amulettes creuses, parfaite pour le LSD, et les tuniques perlees qu'on n'allait plus jamais laver a San Fransisco . Il fallait se le teindre soi-meme, ce sweat qui allait nous tranformer en smiley geant dans les raves avec Caroline. Et je n'aurais pas non plus ete la seule, dans les 90's, a porter une veste en jean sur une robe a fleurs sur un jean troue sur des converse, pour essayer de capter ce chic de sac a merde propre a Courtney Love.
En 2008, on va sur Topshop commander sans vergogne les rescucees du style de Kate Moss, lui -meme inspire par les plus fabuleux mythes rock & roll que la terre ait connus. C'est facile, rapide, pratique, on trouve la meme chose partout. On a perdu l'excitation de la decouverte ultime, cette putain de veste a Pyramide doree unique ayant appartenu a Jimi Hendrix chez Love Saves the Day ou ces bas en dentelles brodees aux initiales d'une cocotte de cabaret a l'Armee du Salut.
Aujourd'hui je m'isole, je trie l'evident, le truc a la reference criante, j'essaie les circuits detournes (le Goodwill d'un trou en Arizona plutot que la friperie pignon sur rue a Manhattan), les vendeurs ebay sans magasin, les petites vieilles decaties des Garage Sales de banlieues pavillonnaires.
Mais je serai toujours plus JelizaRose que Madonna.
Qu'importe, ca ne m'empechera pas de sortir en tailleur masculin etrique a epaulettes comme Annie Lennox, un turban vintage en satin a plume elimee soigneusement visse sur la tete.
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