mardi 8 avril 2008

In Search of the One True Meaning of "Indie"


J'ai repense a Juno. Oui, encore !
Le fait que ce film soit considere comme "indie" ici aux US m'a fait me demander ce que "indie" peut finalement bien vouloir dire.

Parlons en donc encore, du cas Juno (bien utile ce film)

Deja, soyons clair, Juno n'est pas un film independant : il a ete produit par Fox Searchlight, une companie satellite du studio hollywoodien old-school Twenthieth Century Fox, lui meme une branche de News Corp., dont le PDG et fondateur n'est personne d'autre que Rupert Murdoch. Il y a mieux comme icone inde :-)

Bizarement, c'est comme si l'adjectif "inde" avait cesse de decrire les conditions de production d'un film (les vrais films indes restent ceux qui sont distribues par des boites de distribution/salle a manger/chambre qui bataillent severe pour gagner le gros lot, a savoir une semaine de droits de diffusion dans la demi-douzaine de salles ou il est encore possible de faire du profit avec des films sous-titres-je parle ici de l'Amerique et non de la France, encore moins de Paris), mais plutot une nouvelle esthetique , faite de subtilite affectee dans les decors la musique les fringues et les caracteres, assortie de dialogues non moins subtils. En musique c'est pareil.

Regardez la BO de JUNO : inde ou pas? Du groupe de derriere les fagots : Le Velvet, Sonic Youth, Belle and Sebastian. Un defi interessant, du nouveau ? Non. Rien que du previsiblement hype. C'est meme Ellen Page elle-meme qui a recommande les Moldy Peaches. Elle est hype cette gamine. L'esthetique "inde" est creee. Et elle fait mouche, je suis bien de mon epoque, j'ai adore ce film.

Prenez "The Darjeeling Limited" : Jamais Wes Anderson (un vrai realisateur inde pour le coup) n'aurait ete pris en flagrant delit de choix aussi evidents que le "all the young dudes" de Mott The Hopple dans Juno. Tout le monde connait ca ici aux US. Non, Anderson persiste et signe avec de l'obscur, de l'imprevisible : Peter Sarstedt et de la musique indienne. Bon, y a aussi les Stones, ok, mais pas une des plus connues :-)
Il a juste su creuser un peu plus loin.

Mais en meme temps, entre la "mainstreamisation" de l'inde et la popularite croissante de la culture nerd, il ne nous reste plus grand chose d'elitiste, a part le droit de se plaindre et surtout celui de critiquer. On se plaint qu'il y ait du Mott the Hopple dans Juno et en meme temps d'autres vont dire que les Moldy Peaches sont carrement ringards.

On se prend un peu trop le chou a ce qu'il semblerait, et d'un cote, cela pousse les nerds de ce monde a creuser toujours plus loin dans l'independant obscur et le "pour-inities", un peu comme Wes Anderson, pour pouvoir etre sur de garder une longueur d'avance sur la masse. Horrible, affreuse, proletaire, mais qui grimpe vite, la masse. La barre est de plus en plus haute.
De l'autre cote, refusant tant d'intellectualisation , ceux qui lachent l'affaire vont se mettre a decreter que la culture inde est un trucs barbant de geeks snobs et frustres, et vont eriger en principe roi le fait de demolir n'importe quelle production inde sans meme y jeter un coup d'oeil.


C'est ce phenomene qui fait rage en ce moment chez les critiques musicaux et de cinema, et qui a cree l'enorme buzzz autour de Juno aux US notamment.

Et le probleme, celui de la mainstreamisation de l'inde ou de l'indification du mainstream , comme on voudra, est bien tangible car il devient de plus en plus difficile de differencier ce qui est presente comme "inde" par les agences de marketing, de ce qui l'est rellement, independant.

Cela vient du fait que la culture est passee d'un truc relativement personnel, plutot difficile a acquerir, qui demandait des efforts et par la meme devenait quelque chose dont on pouvait etre fier, a un produit que l'on consomme facilement et indifferement quelle qu'en soit la source. Quelle que soit la qualite. On engloutit . Sans se poser de questions . Elle vient comme ca, sans tenants ni aboutissants, alors que nous sommes passivement vautres sur notre canape. On la transmet aussi vite avalee. Et ca le fait. Personne n'aime dire qu'il "etudie" un sujet serieusement, a part les etudiants en these. Et ceux-la representent, quoi, 0.02% de la population.

Rester a la pointe, posseder une vraie culture dans ce climat d'anti-intellectualisation forcene, c'est a mon avis se montrer plutot curieux que snob. Le mainstream, qui se cree en reaction une attitude et une contenance en faisant preuve d'un esprit de contrariete permanent et de critique automatique, cree seulement une illusion de distance, et celebre finalement la paresse et l'autosatisfaction.

Mais attention, je ne decris pas ici un monde manicheen, je ne dis pas que ce qui est inde est forcement de qualite et l'inverse non plus. Il existe de tres bons groupes signes sur des majors, comme de tres bons blockbusters. L'afflut de culture "facile" a aussi du bon.
Et Il y a aussi de tres mauvais groupes non signes sur des majors, comme des films a petit budget qui ne meritent pas votre attention.
La derive existe aussi concernant le deplacement des criteres selon lesquels une oeuvre independante merite ou pas une reelle attention intellectuelle.


Le principal reste de garder les pieds sur terre et les idees claires, de distinguer l'esthetique'inde" de la production inde, et meme de la niche marketing inde quel que soit le domaine concerne (oui oui, attention a la massification du style preppy geek et des lunettes a grosses montures inspires de Luella que H&M s'apprete a lancer dans tous les magasins du monde entier).

Et d'etre capable de prendre du recul sous l'assaut permanent d'information, histoire de se faire son avis a soi.

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